Biennale Suisse du Théâtre d’Amateurs
18-19 septembre 2022
Evolène: quatre langues, un même théâtre...!
Après deux reports successifs dus à la crise sanitaire, la grand messe du théâtre d’amateurs a pu (enfin) avoir lieu à Evolène, au cœur des montagnes valaisannes, les 18 et 19 septembre derniers. Malgré une météo maussade, le succès fut au rendez-vous pour la plus grande satisfaction des organisateurs de la troupe du Tarkess. Leur patience et leur ténacité ont été récompensées avec un public nombreux au rendez-vous et de beaux moments de convivialité et d’amitié confédérales… Récit d’un week-end mémorable par Jean-Daniel Seuret, membre du comité FSSTA et témoin privilégié de la manifestation…
Prologue...
Vendredi dès 16h00 les délégués arrivent, accueillis par le comité d’organisation souriant, prennent possession des documents et de leur logement. Installés, ils peuvent apprécier le superbe décor naturel qui les accueille. Très vite une chaleureuse ambiance de retrouvailles joyeuses s’impose. Cette rencontre s’annonce sous de bons auspices et promet une Biennale nourrie d’échanges conviviaux et amicaux qui se poursuivent en dégustant une raclette locale fort appréciée.
Théâtre dès potron-minet...
Samedi au petit matin, nous constatons que la neige s’est invitée sur les sommets qui nous entourent. Après le petit déjeuner, nous nous déplaçons aux Audères. La fraîcheur matinale contraint les organisateurs à modifier le programme et la matinée qui devait se passer dans les arènes des Reines est transféré dans la salle adjacente. Ce sera le seul regret de ce week-end.
Michel Préperier, premier président du TAS (Théâtre Amateur Suisse) qui est aussi impliqué dans l’organisation, ouvre cette 14ème Biennale avec une émotion palpable car, reportée en raison des restrictions sanitaires, elle est sur le métier depuis quatre ans.
Il remet le brigadier qui porte les plaquettes des 13 Biennales précédentes à Fabrizia Montanari, présidente du comité d’organisation de cette édition. Michel présente encore les représentants des quatre fédérations linguistiques et donne la parole à Natacha Astuto Laubscher, présidente de la fédération organisatrice FSSTA. Celle-ci fait part de son bonheur d’être enfin à l’ouverture de cette 14ème Biennale tant attendue. Cette partie officielle se termine par l’accueil chaleureux de la Présidente de la commune d’Evolène.
Priorité aux créations...!
Place aux spectacles ! Le thème de cette matinée : La petite place. La FFSI est à l’honneur ; l’ouverture est assurée par un groupe d’enfants de Gordola (TI). Cette école élémentaire représente la partie italienne des Grisons avec Siamo bambini ma sulla piazza... (On est des enfants mais sur la place...) Ces enfants sont un véritable rayon de soleil qui nous vient du Sud. Avec énergie, humour, pertinence, ils prennent en main le problème de l’incivilité et décident de nettoyer leur village. Ils nous donnent une leçon d’écologie en préservant leur environnement.
Cette prestation est suivie par I Matiroo, troupe de Vacallo (TI), avec Instant che sa spechia ul sindich (En attendant le maire). La pièce nous emmène sur une place de village, un de ces petits villages qui se dépeuplent au bénéfice de la ville. Farce satirique de Gianni Delorenzi, ce spectacle nous apporte beaucoup de bonne humeur, une histoire facile à suivre qui fait fi des barrières linguistiques. Belle interprétation des 3 actrices et acteurs qui avec dérision présentent un vrai problème social.
Nous terminons cette matinée avec la Cie Catharsis de Ayens (VS) représentant la FSSTA. Quel genre de place? Trouver sa place au théâtre, au bistrot, dans le train, sur la place de jeu. Pour présenter toutes ces possibilités, les changements de décors et de costumes se font à vue et pour mieux correspondre au thème du plurilinguisme, chaque tableau est présenté dans les quatre langues nationales. Belle prestation des acteurs impliqués dans leur jeu et hauts en couleurs qui nous font passer un très agréable moment.
De l’Arène des Reines à la salle des fêtes...
Après un repas servi par des bénévoles que nous remercions au passage, nous nous rendons dans la salle des fêtes d’Evolène pour y suivre des spectacles dont les thèmes sont libres. Nous commençons l’après-midi avec une compagnie de la ZSV, St-Galler Bühne, avec Die Sternstunde des Josef Bieder (L’heure de gloire de Josef Bieder).
Un seul en scène mené de main de maître. Une erreur administrative fait que le public se présente au théâtre alors que c’est jour de relâche. L’accessoiriste se trouve face à ce public ; après un moment de surprise, il présente sa vision du théâtre côté coulisses, met le doigt sur les incompétences de certains administrateurs, sur la vanité de certains artistes, et des bizarreries rencontrées. Il s’agit en fait d’une déclaration d’amour au théâtre. Magnifique performance de cet acteur qui sait tenir en haleine une salle sans que celle-ci ne comprenne la langue. Bravo, c’est un superbe moment théâtral.
L’après-midi se termine par une prestation FFSI, Profumo di donna tra picche e cuori (parfum de femme entre pic et cœur) par la compagnie I Girondini de Lugano (TI). Quatre comédiennes présentent le monde féminin dans toute sa diversité : six types de femmes avec leurs rêves, leurs démons, leurs fantasmes, leurs forces et leurs faiblesses.
Elles se confient, se dévoilent, mais un personnage perfide vient se moquer de chaque personnalité, de tous ces travers humains. Qui est ce juge qui se permet de rire de ces femmes fortes et vulnérables ? Des prestations individuelles puissantes, sincères, touchantes. Des femmes actuelles avec leurs problèmes, leurs folies hilarantes qui font de chacune d’elles des êtres uniques. C’est un moment très apprécié et qui ne manque pas d’animer les conversations, une magnifique prestation au féminin.
Une soirée toute en convivialité...
La journée du 17 se clos par une soirée de gala animée par l’orchestre Les Crooner New Orleans. Le repas est servi par les bénévoles en costume local, ce qui donne un charme particulier à cette soirée. Michel Préperier remercie tout le personnel, la commune et l’organisation pour cet accueil sans faille.
La matinée de cette dernière journée du dimanche 18 septembre commence par une prestation du ZSV avec la troupe Stucka Tour de Volketswil (ZH). Une mise en scène de Simone Brunner nous emmène dans l’univers de Yasmina Rezza et de sa pièce Kunst (Art). Trois hommes sur scène, un tableau, suggéré sur le quatrième mur, blanc mais en plissant des yeux on peut distinguer de fines rayures blanches ; son prix : Fr. 200’000.--. Serge est en admiration devant son acquisition, mais son meilleur ami, Mike, ne comprend pas et ne peut s’empêcher d’exprimer son exaspération, sa fureur devant l’attitude de son ami.
Yvan, un ami commun, est placé au centre du conflit. Très vite il ne s’agit plus de la question fondamentale sur l’Art, mais de l’image que chacun se fait de
l’autre, de la mesquinerie, de l’ambition. De l’importance du paraître, de la place de l’homme social face à la force de l’amitié. La mise en scène et le jeu des trois antagonistes nous emportent et c’est un véritable plaisir de commencer une journée avec une telle prestation hors du commun.
Les Electrons Libres en guise d’apothéose
Les présentations théâtrales se termineront avec la FSSTA grâce aux Electrons libres de Bienne (BE) et leur Pacamambo. Une jeune fille, Julie, n’admet pas la mort de sa grand-mère. Accompagnée de son chien, elle décide de s’enfermer dans la cave de l’immeuble avec le cadavre et son chien dans l’attente de la venue de la mort pour lui dire sa façon de penser. L’imaginaire de Julie nous emmène avec poésie à Pacamambo où chacun peut vivre selon ses désirs, choisir sa couleur de peau, là où les uns sont les autres. C’est un conte enfantin où l’auteur désamorce la peur de la mort, un texte fort bien joué où chacun campe son rôle avec passion. Tout le monde est d’accord pour reconnaître l’investissement des actrices et acteurs, sans oublier le rôle du chien très crédible.
Nous arrivons à a cérémonie de clôture de cette 14ème Biennale. Michel Préperier demande l’attention et remercie le comité d’organisation et sa présidente Patrizzia Montanari pour leur travail, ainsi que les bénévoles qui nous ont accompagnés durant ce magnifique week-end. Un grand merci aussi à la troupe Lé Tarkêss. Il remercie aussi toutes les troupes ayant présenté de magnifiques spectacles et remet à chacune d’entre elles, en compagnie de Fabrizia Montanari, un certificat-souvenir de leur participation en espérant que chacun l’affichera fièrement dans ses locaux.
Il remercie encore la commune d’Evolène et tous les acteurs qui nous ont présentés de très beaux spectacles. Evolène a été le temps d’un week-end une très belle vitrine du théâtre d’amateurs de Suisse et il ne manquera pas de transmettre ce message à l’OFC.
Rendez-vous au sud des Alpes dans deux ans!
La parole revient à Patrick Francey pour la FSSTA, il excuse Natacha Astuto Laubscher qui ne pouvait être présente à l’occasion de cette cérémonie de clôture, et félicite tous les participants pour ce week-end d’échanges au niveau suisse, la meilleure preuve étant le spectacle du matin où une pièce écrite en français a été jouée en allemand. Les idées fusent avec la proposition d’un chalenge pour la prochaine Biennale : une pièce où les acteurs se donnent la réplique dans les quatre langues nationales ! Un grand merci à l’organisation pour un travail parfait et de qualité.
Patrick Francey reprend le brigadier des mains de Fabrizia Montanari et la félicite pour l’honneur qui lui a été fait ce week-end. Il le transmet à Giovanni Fratus, président de la fédération italophone FFSI qui aura le plaisir et l’honneur d’organiser la prochaine Biennale dans deux ans au Tessin.
Giovanni Fratus prend possession du brigadier en espérant faire encore mieux à la quinzième biennale (mais aussi bien serait déjà pas mal…). Michel Préperier termine cette cérémonie de clôture en invitant tout le monde à l’apéritif et en demandant encore à chacun de ne pas oublier de signer le livre d’or.
JDS